En 2021, nous vous présentions les prémices d’un nouveau label BiodiverCity®. Le “Ready”. Cette démarche touchant à sa fin, découvrez au détour d’un échange avec Laure FREMEAUX, écologue référente sur le sujet, le parcours de co-conception de ce nouveau label.
Piloté par le CIBI, il a réuni ELAN, ETAMINE et AIA autour d’un unique objectif : agir en faveur de la biodiversité, à l’échelle du quartier.
Laure, peux-tu nous présenter ce label ?
Le label BiodiverCity® Ready a commencé à être imaginé avec des clients qui travaillaient sur le BiodiverCity® Construction et qui ont rapidement souhaité appliquer la méthodologie d’approche et d’intégration de la biodiversité à l’échelle de quartier. Il s’agissait pour eux de sortir de l’ilot bâti et du bâtiment pour questionner la biodiversité dans une logique d’aménagement.
Les réflexions autour du Ready ont donc commencé en 2015 dans un groupe de travail formé par un certain nombre d’assesseurs du BiodiverCity® Construction, et intéressé par la déclinaison du référentiel à une plus grande échelle. Depuis 2018, un groupement de trois assesseurs, missionnés par le CIBI, en co-pilotent le développement.
Pour ce faire, ELAN, AIA Ingénierie et Etamine, continuent de s’appuyer sur l’expertise et les retours d’expériences des précurseurs du label ainsi que sur des projets pilotes qui se sont engagés dans la démarche de labellisation BiodiverCity® Ready. S’ils ont suivi la démarche et seront évalués par le référentiel de sorte à obtenir un label pilote, ils auront surtout permis des retours d’expérience opérationnels, et donc la mise en place d’une logique d’amélioration continue unique en son genre.
Quel intérêt pour les projets de construction de travailler la biodiversité à l’échelle du quartier ?
Aujourd’hui, il n’est plus possible de ne pas parler de biodiversité à l’échelle du quartier. Les enjeux de continuité écologique, de trame noire, de préservation de la faune et de la flore en phase chantier, de gestion des eaux, des ilots de fraicheur ou encore l’opportunité de proposer des expériences de nature, obligent les aménageurs à se poser la question. D’autant que le durcissement des règlementations, la vague verte électorale et les attentes des utilisateurs imposent la prise en compte de certaines démarches de préservation, de protection ou d’encouragement.
L’échelle du quartier offre en outre une capacité d’actions plus intéressante, notamment sur le plan des continuités écologiques. En phase chantier d’abord puisque si un certain nombre d’actions en faveur de la biodiversité sont difficiles à envisager lorsque l’on s’intéresse uniquement à un lot bâti (ex : réutilisation des terres du site, maintien des zones de refuges pour la faune et la flore…), les échelles, spatiale et temporelle du quartier, permettent d’avoir des actions plus efficaces pour la préservation de la biodiversité urbaine (ex : adaptation du planning travaux pour anticiper stockage et réutilisation des terres excavées, maintien de zones non défrichées pour conserver des espaces refuges…).
Ensuite, en phase conception, il devient plus évident d’éviter les cœurs d’ilot tournés sur eux-mêmes pour leur préférer des lots en connexion avec un parc urbain ou une coulée verte. Ce qui créé naturellement des espaces plus fonctionnels sur le plan écologique.
Comme pour le label BiodiverCity® Construction, le label BiodiverCity® Ready se met donc en place à partir de la phase conception. Mais parce qu’il pose la question des continuités écologiques et des usages, il anticipe de facto la phase exploitation. Ainsi, la nécessité de créer des passages à hérisson identifiée en phase conception trouvera son utilité pratique en phase d’exploitation !
La règlementation est-elle aussi un levier de motivation pour les aménageurs ?
La règlementation sur les espèces protégées existe depuis longtemps mais on observe une application de la loi de plus en plus stricte, notamment pour le secteur de l’immobilier. Cette situation, au-delà des enjeux de préservation de la biodiversité, fait des recours portant sur cette thématique un nouveau et puissant levier pour celles et ceux qui s’opposent à ces projets. Qu’ils soient réellement ou non soucieux de la préservation de la faune et de la flore locale, ils y trouvent un moyen de recours facile car si la règlementation est bien appliquée, la thématique, dans l’immobilier est encore souvent mal intégrée.
S’ajoute à cela des ambitions politiques de plus en plus affirmées sur le sujet en anticipation notamment de la mise en application de la loi portant sur la zéro artificialisation nette.
A l’échelle d’un quartier, il n’est plus possible de passer à côté du sujet biodiversité. L’anticiper c’est la garantie de la faisabilité du projet et l’opportunité de satisfaire autant les nouveaux besoins socio-politiques que les besoins de nature, de contact avec le vivant, des usagers.
Quelles différences ou complémentarités avec les Labels BiodiverCity® Construction et Life ?
Les labels BiodiverCity® Construction et Life touchent respectivement au phase conception/construction et exploitation des projets immobiliers.
Le BiodiverCity® Ready quant à lui est l’équivalent du Construction mais pour des projets de quartier. Il pose donc les mêmes questions, dans les phases de conception, mais à une échelle différente.
Autre différence, si le BiodiverCity® Construction est basé sur des éléments, des solutions techniques, qui seront mis en œuvre dans le projet immobilier (palette végétale, surface d’espaces verts, dispositifs pour la faune…), le BiodiverCity® Ready interroge plutôt le cadrage de l’ambition.
En effet, l’aménageur privé ou public, la collectivité qui porte un projet d’aménagement ou encore les opérateurs urbains, n’ont pas la main sur l’ensemble des lots. Il s’agira donc pour eux de questionner les informations données, les objectifs imposés, les éléments coconstruits, la cohérence entre espaces privés et publics, ou encore la mutualisation des logiques écologiques.
Avec Ready, le CIBI a imaginé un référentiel qui va traiter toute la complexité des projets d’aménagements : intégration d’une multiplicité de parties prenantes, adaptation aux échelles temporelles et spatiales. In fine, la réflexion aboutira à une ambition et un cadrage permettant de guider et structurer le processus d’aménagement par rapport à la prise en compte de la biodiversité.
A l’échelle des lots en revanche, la responsabilité de préservation de la biodiversité sera laissée à la charge du promoteur. Ainsi, dans un quartier engagé dans une démarche BiodiverCity® Ready, les promoteurs peuvent, sans en avoir l’obligation, obtenir une labellisation BiodiverCity® Construction.
En travaillant son plan masse pour questionner les limites privé/public et implanter des continuités écologiques entre des espaces verts et une voie verte, l’aménageur va en effet donner des orientations architecturales et paysagères pour le quartier. Il pourra aussi par exemple imposer qu’aucun cœur d’ilot ne soit entouré de bâtiment mais que les espaces verts soient plutôt positionnés de sorte à être voisins d’un parc. Le promoteur quant à lui devra, à l’échelle du projet, travailler ses espaces verts de sorte à les réintégrer dans les continuités écologiques plus globales mais il sera libre dans sa manière d’en assurer le fonctionnement et l’usage à l’échelle de son lot.
Ready et Construction sont donc des approches complémentaires mais qui ne sont pas interdépendantes.
Comment un projet immobilier peut-il obtenir la labélisation BiodiverCity® READY ?
Le processus de labélisation BiodiverCity® Ready s’articule en quatre étapes. Les deux premières portent sur la conception et se réalisent dans les premières années du projet d’aménagement.
En premier lieu, le projet doit s’engager dans la démarche BiodiverCity® Ready. Ensuite, à la fin des études de conception, le projet obtiendra une note sur 4 axes lui permettant ou non d’obtenir sa labellisation.
S’en suivent alors deux étapes de vérifications qui ont vocation à suivre la déclinaison de l’ambition dans le quartier. La première, va consister en un audit des différents permis de construire qui seront déposés tout au long de la construction du quartier.
Essentiellement documentaire, elle cherche à vérifier et suivre la déclinaison de l’ambition écologique. Le second visera quant à elle à mettre à jour l’évaluation écologique du projet au travers de visites de sites organisées lors des livraisons des lots.
Et compte tenu de l’échelle de temps des projets d’aménagement, ses démarches peuvent évidemment être très longues.
Les équipes d’ELAN remercient chaleureusement le CIBI pour son initiative ayant permis de mettre en place cette démarche. Et félicitent l’ensemble des assesseurs et des acteurs ayant travaillé à la mise en place de ce label prescripteur d’une meilleur intégration et préservation de la biodiversité au sein des projets de construction de quartier.
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